Mon mari n’est pas un violeur !
C’est sur cette phrase prononcée par la compagne de Nicolas Bedos, Pauline Desmonts, que j’avais envie de démarrer cet article. Cette phrase nous parle de beaucoup de choses que je vais décortiquer pour vous : la culture du viol, la remise en cause de la parole des victimes, le mythe du monstre, le déni de la société… J’ai vraiment envie de vous donner les clés pour ne plus être complice de cette culture patriarcale qui nous fait croire n’importe quoi, surtout quand il s’agit de protéger les agresseurs au lieu des victimes !
Rappel du contexte
En juillet 2023, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour viol et agression sexuelle concernant Nicolas Bedos. Selon les infos disponibles sur le net, 4 femmes auraient porté plainte contre lui et l’acteur/réalisateur sera jugé en septembre 2024.
Le 20 janvier dernier, Pauline Desmonts, sa compagne, était sur le plateau de l’émission “Quelle époque !” animée par Léa Salamé. Elle a pris la parole pour défendre l’acteur face aux accusations d’agression sexuelle. Elle évoque le côté excessif de Nicolas Bedos, les fêtes, l’alcool, l’humeur variable et son côté “odieux”, mais elle “sait” que ce n’est pas un violeur.
Elle a d’ailleurs réalisé un documentaire qui donne la parole à l’entourage de Nicolas Bedos, qui, selon elle, sait faire la part des choses entre ses excès et le fait que ce n’est pas un violeur.
Le mythe du monstre
Lorsque l’on interroge nos stéréotypes sur les personnes qui commettent les agressions sexuelles et violences faites aux femmes, nous imaginons rarement notre voisin, notre collègue adorable, notre frère, notre meilleur ami, notre père, etc. Nous imaginons un gars crasseux avec une cagoule qui agresse ses victimes dans la pénombre d’un parking ou d’une ruelle ou éventuellement à la sortie d’un bar…
Mais les agresseurs sont les fils, frères, amis, collègues, maris ou pères de quelqu’un ! Ce ne sont pas des reclus, rejetés par la société, isolés et seuls. Ce stéréotype représente une toute petite partie des agresseurs. Les chiffres de 2023, récoltés par l’Institut national d’études démographiques (Ined) en France concernant les agressions faites aux femmes révèlent que 9 femmes sur 10 connaissent leur agresseur. On est donc bien loin du mythe du monstre et de l’agresseur isolé et rejeté qui se cache derrière les coins de rue.
“Je le sais, mon mari n’est pas un violeur !”
Bien sûr, il faut admettre que c’est difficile à encaisser. Le déni est un outil puissant utilisé par chacun.e d’entre nous pour éviter d’avoir à affronter une réalité à laquelle nous avons du mal à croire.
Le violeur de la Sambre, Dino Scala, a avoué 40 viols. Sa femme a longtemps prétendu que ce n’était pas un agresseur. Bon évidemment, cet homme avait un profil psychologique un peu plus flagrant que Nicolas Bedos, mais ce que je veux démontrer, c’est qu’il est difficile d’imaginer que quelqu’un de proche soit un agresseur. Tout simplement parce que ce n’est pas cette part de lui qu’il nous montre.
Je me suis posé la question : comment je réagirais si quelqu’un que j’estime, aime et admire est accusé d’agression sexuelle ? Ce serait vraiment douloureux, encore plus vu mes engagements ! Mais je pense que je laisserais au moins la place au doute et jamais je n’affirmerais “NON, ce n’est pas possible !”, rien que pour respecter la parole de toutes les victimes. Bien évidemment, je serais profondément meurtrie, remplie de doutes et dévastée.
Emmanuelle Seigner nous a fait le même coup en prétendant que son mari, Roman Polanski, était tellement beau qu’il n’avait pas besoin de violer. Il a pourtant été condamné. Alors bon… Faudrait savoir ! Au nom de la présomption d’innocence, il faut laisser la justice faire son travail et quand elle le fait, elle l’a forcément mal fait. Décidément, ils n’ont vraiment pas de chance ces agresseurs.
La parole des femmes systématiquement remise en cause
Voilà près de 14 ans que j’accompagne des femmes victimes d’emprise et de violences conjugales. L’opinion publique, la justice, les institutions, les services d’aide à l’enfance, les experts et expertes auprès des tribunaux… Absolument TOUS remettent en cause la parole des femmes !
Les femmes mentent, les femmes veulent se venger, les femmes n’acceptent pas la séparation, les femmes ne laissent pas la place aux pères, les femmes protègent trop leurs enfants et bla-bla-bla. Bizarrement, les femmes ne diraient jamais la vérité ? Quand elles dénoncent un agresseur, ce serait forcément pour se venger ? Mais elles gagnent quoi en fait ?
Quand Pauline Desmonts prend une position publique qui dit “Mon mari n’est pas un violeur !”, c’est tout le combat mené par les féministes pour libérer la parole des femmes qu’elle met en cause. Quand Emmanuelle Seigner tient ses propos pour défendre son mari et dire à quel point il est brisé, c’est aussi toute la parole des femmes qu’elle fait reculer.
La culture du viol
Dans un précédent article, je vous parlais de la culture du viol. Cette culture encore tellement ancrée qui minimise, banalise et encourage les comportements d’agressions. Dans la défense des agresseurs et le déni des proches, tout y est ! On l’a encore vu avec l’affaire Gérard Depardieu. Emmanuel Macron a été jusqu’à dire que Gérard Depardieu rendait fier la France ! Un homme qui est accusé d’agressions sur lequel circulent des images où il est clairement obsédé par la sexualité, les femmes, les “blagues” lourdes, etc. Où est la fierté ? Minimiser ces actes, “séparer l’homme de l’artiste”, refuser de croire les victimes et mettre leur parole en doute… Tout ça sont les outils bien armés de la culture du viol qui a encore de belles heures devant elle.
Les violeurs et agresseurs sexuels sont des “monsieur tout le monde” à qui on donnerait, parfois, le bon Dieu sans confession. Mon but n’est pas de vous dire de vous méfier de tout le monde et d’avoir peur de votre mec ! J’essaye simplement d’éveiller les consciences et de faire ma part pour que la parole des femmes ne soit pas systématiquement mise en doute parce qu’une autre femme ne peut pas imaginer que son mari soit un agresseur.
Je développe tout ça et bien plus encore dans mon livre “Clouer le bec au patriarcat”
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